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pour l'éternité

9 Juin 2014, 11:55am

Publié par Horizontes

Première partie de la traduction (provisoire) du texte de Miguel Sousa Tavares, Eternamente, extrait de "Não te dexarei morrer, David Crockett", éd. Officina do Livro, 2008.

Ce texte, très littéraire et poétique, évoque une rupture et tisse diverses métaphores autour du temps qui passe, rompant les liens tissés au cours de la vie. La traduction est en cours et la traduction des premiers paragraphes, élaborée lors de l'atelier du 6 juin,  n'est pas définitive

traduction :

J'ai écris ton nom et ton numéro de téléphone sur une page de l'agenda de février. Et, en l'écrivant, je savais que c'était un adieu, mais tout le mois de mars, nous nous sommes attardés dans les adieux, comme des crabes à marée basse.

Sans toi, je lançais d'autres racines, construisis des cours et des terrasses, des fontaines dont le son devrait étouffer tous les silences (1), j'ai planté un verger au parfum d'abricot ; j'ai demandé de faire un banc de craie (2) autour d'un arbre pour contempler les étoiles dans le ciel, un chemin au milieu de l'oliveraie où le clair de lune se reposerait la nuit, des voûtes de briques imaginées par le plus savant des architectes et même des toiles d'araignée suspendues au plafond comme pour surveiller l'écoulement du temps.

Tu n'as rien vu de cela, j'ai rien dit, rien n'est à toi

Seuls, moi et l'araignée pendue à sa toile, nous nous contemplâmes longuement, comme qui se découvre, comme qui se recueille, comme qui se cache

Ce fut ainsi que j'ai vu défiler les années, les murs s'assombrissaient, la poussière des briques se déposaient sur les pages de ces mêmes livres que j'ai lu et relu. Heathcliff, Catarina Linton emportés une autre fois par la minutie (3) du temps.

Comment t'expliquer comment tout ceci t'est devenu étranger, comment tout se semblerait maintenant étrange, comment rien de ce qui t'appartenait ne guette ton hypothétique retour ? Ulysse ne reviendra pas à Itaque et, la nuit, nulle Pénélope ne défera la toile que tu t'es tissée ...

 

(à suivre)

notes :

(1) Cujo som deveria apagar todos os silencios. apagar - effacer, éteindre - est traduit ici par étouffer. Certes on étouffe un bruit, mais peut on étouffer un silence ? on devrait peut être écrire : "couvrir tous les silences", mais est ce que cela rend le verbe "apagar". Le choix de l'oxymore rappelle ici celle, connue, de l'expression "un silence assourdissant"...

 

(2) Cal : chaux, craie

 

(3) minúcia : détail. le dictionnaire priberam définit : "1 Coisa mínima; bagatela; minuciosidade; insignificância 2. Particularidade, minudência. - donc : détail, insignifiance, minutie. Comment traduire : l'idée est que le temps érode petit à petit, minute après minute, les personnages de "autant en emporte le vent", mais on pourrait peut être traduire aussi par "insignifiance" : le temps ne signifie rien, ne donne pas sens, et ne fait qu'introduire le désordre, le chaos, dans la vie. minucia, minutie, et minute ayant la même étymologie latine (se rapportant à la notion de "détail", "parcelle"), on pourrait dire "les minutes du temps"... désignant à la fois les fragments temporels (minutes) et les "détails" (comme les minutes d'un procès). Donc quelle traduction choisir : "détails", "minutie", "insignifiance" ou "minutes" ??


"minucia", in Dicionário Priberam da Língua Portuguesa [em linha], 2008-2013, http://www.priberam.pt/dlpo/minucia [consultado em 09-06-2014].
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